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    Le Roi des Fainéants


    Dans une sylvestre contrée, bercée par l'incertain clapotis d'un ruisseau un peu timide, les habitants paisibles accordaient à la sieste toutes les parts de leur temps. Réveillé en sursaut par le bâillement d'une Carpe, le roi R ouvrit les yeux. D'un regard embrumé de sommeil, il balaya le mouvement des statues de bois qui s'affairaient patiemment à contredire les soubresauts du vent. L'air du pays était très nourrissant ce qui l'avait jusque-là dispensé de livrer ses mâchoires au pénible effort de la mastication, si bien que personne n'avait jamais rien fait depuis son épuisante montée sur le trône. La devise du royaume formait un heptiptique dont l'oubli avait suivi la trouvaille et qui n'aurait servi qu'à asseoir une certaine forme de vanité. Le seul métier durable était maître sommier.

    Soucieux tout de même de sa prestance royale, il ajusta sur sa tête la légère couronne faite des sourires de sa dynastie et corrigea la posture avachie de ses repos par la rigueur dilettante d'une allure souveraine.

    Mais l'esprit des hommes est faible et le mal rôde en silence, s'insinuant sournoisement dans les cœurs les plus purs. Ailleurs peut-être. Là, non.

    Cela dit, l'effervescence du réveil anima une idée. Souhaitant inscrire son règne comme celui d'un sire à causes, il souffla à la corolle d'une Amaryllis Messagère de chercher sur ses terres une légende consistante. La requête suivit nonchalamment les aléas de la voie florale, époussetant les Pissenlits de leurs volatiles gonades. Poussée en orée par les vents capricieux, Dominique le Champignon, béat d'avoir passer la bague au pied de Dominique la Champignon, la parasita d'une crotte de chapeau. Un tantinet précieuse pour sa graine ordinaire, Marguerite la Marguerite émit entre sépales qu'il n'était pas très spore...


    A l'ombre de l'aube, le visage effleuré par les larmes d'un saule, A somnolait calmement quand une odeur à sens vint rouler dans ses narines. Un jour ou l'autre, il avait voulu monter une affaire de moulin à vent en kit pour héros sans ennemi mais son ardeur à la tâche avait simplement permis qu'elle restât une idée qui gonflait sans attente la liste abstraite des choses à faire. Le parfum de cette curieuse missive se mélangeait maintenant à la bruine aérienne de la rosée du soir, donnant au crépuscule une saveur d'épice.

    Un livre entrebâillé sur une table basse présentait au plafond ses fines illustrations. On y voyait Simon-Singe Hiératus fier de sa statue en pied, avec pour sous-titre : «A chaque statut sa statue». Mais ce on était beaucoup trop vague pour la réalité de la situation, en vérité, seul le plafond qui statuait à bonne hauteur au dessus d'un parterre de parts de sol aurait éventuellement pu le voir s'il était autre chose qu'un plafond, ou alors peut-être l'encadrement d'absence de porte, en louchant un peu de biais, et encore.

    Heureusement, l'ouvrage qu'il cherchait se trouvait à portée de main de son lit d'herbe folle et il pu l'atteindre en tâtonnant de l'index. Par un paresseux hasard, il s'ouvrit à la définition d'une légende :

    « Pour faire une bonne légende, commencez d'abord par une pétillante réalité. La légende est souvent assimilée à la quête. Donc commencez par chercher quelque chose, si vous ne savez pas quoi chercher, cherchez quoi chercher. Une petite astuce pour nos intrépides lecteurs, une légende se conte a posteriori, vous pouvez donc entamer votre quête sans attendre d'avoir un but que vous placerez subrepticement en en-tête à l'issue du périple».


    Il se mit à dodeliner des paupières à la manière élégante des caméléons et se dirigea vers la porte de son moulin. Les divers interstices de l'édifice saisissaient les solstices, magnanimes pour quelques rais seulement, plongeant la demeure dans une tendre luminosité que les sons épongés par une mousse pandémique coloraient de wah-wah. Emerveillé par tant de simplicité fleurie, il poussa le vice en papier d'avion jusqu'à utiliser deux yeux.

    Pour ce peuple engourdi, le tumulte lent des révolutions végétales relevait du tertre de l'exotisme, et l'application spatiale d'un proverbe idiot le décida de ne pas faire plus loin ce qu'il pouvait faire chez lui. Bon, normalement c'est à ce moment qu'il entame la quête dans son hall d'entrée mais les épisodes concernant les chaussures étant relativement insipides, nous oublierons adroitement d'en parler, à moins que ça n'intéresse vraiment quelqu'un mais jusqu'à présent ça n'a jamais manqué. Et puis ça oblige à énumérer une série de détails stupides comme sa pointure ou la couleur de ses pantoufles et ça autant vous dire qu'on peut éventuellement s'en passer sans offusquer qui que ce soit... Et puis rassurez-vous...

    - Euh, excuse! Tu peux la fermer?

    - C'est ça ! J'ai pas mon mot à dire, hein ?!

    - Pas vraiment pendant les heures de boulot, finalement.

    - Les mioches s'en foutent de toute façons! Y a pas d'histoire, je fais du remplissage comme je peux mais ça les intéressera pas! Je m'use la voix pour cette bande de chiards et c'est...

    - Si tu veux pas rater l'éclipse, c'est maintenant ou jamais pour la fermer...

    - Mouais... Bon, j'en étais où ? Ah ouais, le passage où tout le monde se branle de ses godasses...

    - Ca va aller, oui ? Tu veux peut-être te retrouver conteur pour poubelles ? T'as signé un contrat alors tu termines si tu veux les pépettes ou c'est les Prud'hommes, ok ?!

    - COUPEZ !!! Mais vous le faîtes exprès, ma parole !? C'est «tu termines si tu veux les pépettes ou c'est les Prud'hommes, HEIN?!», c'est pas compliqué merde !

    - « C'est les Prud'hommes, HEIN?! » Mais, c'est nul !

    - Ca va aller, oui ? Tu veux peut-être te retrouver comédien pour poubelles ? T'as signé un contrat alors tu termines si tu veux les pépettes ou c'est les Prud'hommes, ok ?!

    - MEEERDE ! C'est encore la machine à écrire qui a sauté !!

    - D'accord la machine à écrire déconne mais tu pourrais quand même faire des brouillons. Et puis qu'est ce que c'est que cette histoire à dormir debout ?

    - Ben, moi je suis juste l'écrivain qui écrit l'histoire d'un comédien qui joue un narrateur, alors tu sais...et de toute façon c'est ma pause.


    Entracte.


    Après un tas d'aventures trépidantes, notre héros...

    - Quelles aventures?

    - T'occupes! Tu me laisses finir cette fois?

    - Cette fois oui.

    - Cinquante-six.

    - Cinq...? Ton humour est drôle, mais c'est pas vraiment le moment.


    Je reprends, si on me laisse travailler en paix! Après un tas d'aventures, trépidantes donc, notre héros se trouva soudain face à fesses avec une horde de Bourets dont l'apparente quiétude n'avait d'égal que l'impétuosité à la charge et dont les membres glabres, dénués d'articulations, tendaient au sol avec une longueur fourbe. Un disque ligneux tenait lieu d'encéphale sur lequel orifices et protubérances ne laissaient percevoir la moindre volonté ce qui rendait toute anticipation des plus inconséquentes. A se souvenait d'une estampe vaporeuse figurant un ancêtre caressant le sien, mais si longtemps reclus dans ce cloître réduit, leur docilité avait dû d'un ton ferme poser sa démission.

    Sous le joug sans caresses d'un flot d'idées confuses, les Bourets juste cois, tirés de leur présence par un soupir, tournèrent en grinçant leur faciès insensé. La tension était telle que les divers coups d'œil râpaient sur l'air intense la cornée du héros. Mais les Bourets sont gauches, leur séléniotropie les rend un rien prévisibles. La principale épreuve serait de s'en défaire. Pour pallier au problème, il se mit en équerre.

    Les Bourets confondus par ce fin stratagème, reprirent incontinent les conditions premières de leur captivité. Discret comme un alphabet sans lettres, A traversa la pièce sur la pointe. Bien qu'inconfortable, cette démarche offrait le privilège d'être inédite et sûre, le menant sain et sauf jusqu'au détour d'un mur.

    - De quoi on parle exactement?

    - On peut pas finir un paragraphe sans être interrompu, ici!! Bon... Ils sont attirés par les fesses, les "lunes", "séléniotrope" de [sélène, la lune] et [-trope, attirance] et donc en se penchant en avant, ses fesses sont moins protubérantes et il arrive à passer dans l'autre pièce. C'est bon?

    - Qui "ils"?

    - Les tabourets.

    - Les tabourets!?

    - Oui, les tabourets.

    - Faudra peut-être revoir le scripte, c'est pas toujours clair ton histoire!

    - MAIS C'EST PAS MON HISTOIRE! On m'a filé ce torchon hier, je fais ce que je peux avec.

    - Désolé de vous interrompre, mais on a la caméra que pour cet après midi alors si on pouvait continuer...

    - On s'explique, c'est tout. Vous aurez qu'à couper.

    - On n'a pas la machine, tout ce qui se dit va être sur la bande.

    - J'aimerais passer le bonjour à Mimi, Dédé, Charlie...

    - COUPEZ!!!! Mais c'est pas vrai!? Vous vous croyez où!? On reprend! Silence! Action! Ca tourne, etc...

    - De toutes façons, j'ai pas trouvé le bouton à temps pour éteindre, alors ça tourne encore, mais on n'a presque plus de pellicule, il va falloir accélérer.


    Il reconnut alors un espion de village subtilement travesti par un costume plumé de vivipare éteint, ancêtre de la Poule, n'ayant depuis longtemps parcouru nos forêts. Ces volailles à bébés, en ce temps-là pondaient de chétifs poussins, bien trop vite écrasés par l'avide pesanteur. Dame nature, toujours célibataire, veillant à la survie de ses plus laids enfants, informa un corail, amateur de caca, qu'une concrétion sphérique serait sollicitée pour courte protection d'un fragile nouveau né, et qu'en échange il serait nourri et logé. Pour que le poussin rond puisse un jour respirer, il fut doté d'un bec au convexe acéré. La ressemblance étrange, légèrement surannée entre lorgneur expert et vieille gallinacée donnait à son charisme le secret de l'autruche, qui plongée dans son trou s'invente un mimétisme. Ils échangèrent un peu de ces futilités qui lient les hommes entre eux sans grande difficulté et se quittèrent pour rien, l'un cherchant la lumière, l'autre l'obscurité.

    Aidé par un frisson, il passa les murailles menant à l'autre pièce, négociant l'espace vide entre les molécules, comme un skieur en course se sert de ses spatules.

    - En alexandrins, c'est beau aussi... Et le côté philo, l'œuf ou la poule et tout ça, c'est très ludique!

    - Ouais c'est génial! Continue, toi!


    Il découvrit alors un curieux microcosme : le ruisselet voisin, en école buissonnière, semblait profiter d'un après-midi libre pour investir les lieux. La salle était remplie d'un tumulte fluet qui s'exerçait aux vagues. Une oréade ailée marquait de poudre claire les records sur la pierre. Elle flattait son écume en y trempant les doigts et d'un geste gracieux s'aspergeait de ses gouttes. Un air agréablement givré portait avec élégance une Mouette légère qui apaisait le ressac de ses mélodies océanes. Au comble de l'insouciance, il crut léviter jusqu'à elle pour mourir dans ses bras quand une logique humide lui rappela que même si l'esthète voudrait y croire, ou en faire une aubade, on ne vole pas et que cette sensation de volupté, c'était la noyade. La merveille, qui avait bien sûr son diplôme de secouriste, installa l'infortuné sur une portion d'eau sèche que son ami consentit à céder. Elle était simplement belle, avec de fabuleux cils trois fois plus volumineux, des lèvres fines comme un rebord de cendrier qui diffusaient par les meurtrières de sa dentition les effluves du fluor. Son crâne chauve, poli avec le soin des fées, reflétait les couleurs de l'amour. Mais l'impondérable tracas lié à ces êtres délicieux, habités par une grâce dont seuls sont capables les Colibris, est qu'elle sied tant à celles qu'à ceux qui la sourient, et une voix épaisse modéra d'emblée les ardeurs en dépit.

    La Mouette se mit à beugler dans une sorte de parade nuptiale pour séduire les usines mâles, reprise en cœur par un millier de moules pour un tapage assourdissant.

    L'initiale emmerdeuse se dirigea sans bruits vers l'épicentre de la virilité et toisa sirupeuse les iris éblouis avant de jouer à mettre des petits coups de bec dedans.

    Se rappelant qu'il avait quelque chose sur le feu follet, il prit poliment congé de ses hôtes. En plus, sa maman ordonna au ruisseau de se mettre au lit.

    Il s'enfuit en courant dans la pièce voisine et soudain, une intense lumière surgit d'une autre dimension, certes magique mais gênante. Alors que rien ne l'avait laissé supposer, un homme entre deux troisième-âge se jeta violemment sur lui, et on dira que c'est vrai parce que c'est l'intention qui compte. Une fois qu'il se fut relevé, un peu poussiéreux, il remit ses lunettes d'aplomb. "Bonjour étranger, je suis l'oracle, et ouais! Tu as passé toutes les épreuves avec succès, ainsi, tu deviens le digne réceptacle du secret interdit qui ne se transmet que d'oracle à étranger. Et...

    - Vous êtes chez moi.

    - T'as compris ce que je viens de te dire ?!

    - J'ai un bail qui comprend toutes les dimensions qui sont à l'intérieur de ma maison alors "étranger", c'est un peu fort, non? Dégagez de mon salon.

    - Non mais tu le fais exprès? Tu es le digne réceptacle de...

    - Mais qu'est-ce que vous voulez que ça me foute d'être un réceptacle, ça se mange ? Allez, ouste!

    Heureux et satisfait d'avoir vaincu tous les périls jusqu'à chasser l'envahisseur, A vacilla jusqu'à la porte de sortie et s'allongea sur l'herbe dans un nuage de Papillons.

    - COUPEZ, elle est bonne, on la garde. Merci à tous, on a fait du bon boulot... Enfin on a fait du boulot... Enfin, je sais pas ce qu'on a fait mais on va pouvoir récupérer la caution de la caméra si on traîne pas trop en route. De toutes façons, ce qui marche en ce moment c'est les westerns.


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    Les Enquêtes de l'Endive,

    Victor l'Endive


    JOUR 1


    Je suis de ceux qui ont besoin du désordre et qui savent en faire avec peu de choses. Ca peut paraître idiot mais je suis plus à l'aise dans ma sueur que dans des habits propres. Idem pour mon taudis. Les volets sont toujours à moitié fermés parce que la seule fenêtre donne sur l'immeuble d'en face et le type avec son tricot trop court ne m'inspire que des fantasmes limités. Les premiers jours, je restais assis devant et puis on s'est retrouvés face à face par vitres interposées, du coup, il a voulu parler. Certains disent qu'il faut bien s'occuper, moi, ça m'est égal. C'est pas tellement que j'aie quelque chose contre les adipeux, mais parler avec les gens c'est mon boulot alors autant vous dire que les voisins m'ont toujours trouvé distant. Faire la causette tous les jours avec les gens qui n'ont pas compris que la loi, c'est la loi, ça vous endort même les plus bavards. Si en plus ceux qui sont normaux détaillent en quoi ils le sont, je préfère regarder ma tapisserie. De toutes façons, j'ai jamais besoin de rien alors pas la peine de sourire.

    On m'a mis sur une affaire importante. Je m'y attendais plus. Ca fait deux mois que j'enquête sur le meurtre de la petite Ellaide. Elle est morte le même jour que l'ampoule de mon salon, tiens.

    Par la demi-vitre embuée, je vois samedi et le ciel ne s'est même pas déplacé pour l'occasion. Demain, j'ai rendez-vous avec l'ex-père Jean-Charme, le curé défroqué soupçonné d'avoir tué la fille.

    Aujourd'hui, je n'ai rien à défendre, même pas mon apparence, et comme je suis assermenté, j'ai juste enfilé mon pardessus par dessus mon pyjama troué, comme le nom du pardessus l'indique. Avant toute chose, je passe au boulot pour rassembler les preuves et les photos ratées du tripier. Dans la rue, c'est encore une de ces journées pleine de gens équitablement vilains qui suivent un instinct d'homogène. C'est un étranglement très sobre, et comme elle était laide sous tous les profils, les médias n'en n'ont pas parlé.



    JOUR 2


    J'attends le bus.

    Quand il arrivera, j'attendrai le prochain. Aujourd'hui, j'ai envie d'attendre. Si possible mollement. Rester avachi dehors dans une position inconfortable pour savourer le léger ennui des dimanches. Et surtout ne pas mettre ce temps à profit. Quelques fois dans la journée, il faudra regarder la pendule pour avoir l'air d'attendre, une pendule qui marche, pendant que moi, je ne fais rien. De temps à autre, je ferai semblant de regarder mes chaussures. Voilà. Bon.

    Et pouvoir pousser bien profondément un gros soupir de lassitude molle. Si un type vient me parler, il aura droit à un regard terne de vache qui broute et un gros soupir. Ou alors répondre «ouais bof» que la paresse des lèvres pâteuses transforme en «mouais bof». Ca me gratte. Je me gratte. Il fait beau, hein? Mouais bof. C'est bien, hein? Mouais bof.


    Dimanche, fin d'après-midi. A peine arrivé chez Jean-Charme, j'ai comme la certitude qu'il est innocent, je sens ces choses là. On a discuté un peu et puis bien vite, on a tourné en rond parce qu'il ne savait pas de qui je lui parlais.

    - Ellaide ? Mais c'est un prénom affreux.

    - Ouais.

    Au moment de lui serrer la main pour lui dire au revoir, il m'a dit qu'il n'avait pas de bras. Voilà. Bon.


    Il reste à savoir pourquoi il ne l'a pas tuée. Qu'est-ce qui peut pousser ce genre de psychopathe à respecter suffisamment la vie pour épargner une fille aussi laide ? Comment a-t-il pu ignorer jusqu'au soupçon de la vengeance, sans jamais vouloir transcender son handicap ? Parce qu'elle est vraiment laide, c'est indéniable, et compte tenu des prouesses de l'artiste pour ne pas la défigurer, on peut presque y voir un message. De là à dire que l'art veut dire quelque chose, on ne franchira pas le pas mais ce respect doit signifier quelque chose. En plus, il s'est défroqué, il n'a plus besoin de faire semblant d'aimer son prochain.

    Mon métier, c'est de chercher les points communs et en l'occurrence, Jean-Charme semble innocent donc ni lui ni le meurtrier ne l'ont dévisagée, il doit être dans le coup. Le salaud, et dire que je l'ai cru innocent. Il cache bien son jeu. Si ça l'amuse de mentir, tant mieux pour lui, ce qu'il m'a dit je l'aurai oublié dans cinq minutes, alors que ce soit vrai ou pas...de toutes façons il est coupable parce qu'il est louche.

    Il faut que j'en apprenne d'avantage sur Ellaide, ce qu'elle était, ce qu'elle faisait, qui elle fréquentait. Oh, et puis en fait, ce qu'elle était c'est le boulot du curé, ce qu'elle faisait, c'est l'affaire des déménageurs. Et en fait qui elle fréquentait on s'en fout. Il faut juste que j'arrive à m'occuper jusqu'à ce qu'on me confie une enquête plus intéressante.

    Je décide de passer à la morgue, histoire de voir le cadavre de mes propres yeux. Le type m'envoie balader sous prétexte que je suis en pyjama. Sacré tocard, toujours le mot pour rire. Le truc, c'est que je suis assermenté, alors il peut toujours crier, et d'une moi je m'en fous et de deux, c'est pas les autres qui vont râler parce qu'il y a trop de bruit. Mais quand je soulève le drap, quelque chose me frappe, alors je le frappe aussi et regarde le corps de plus près. Je dois me rendre à l'évidence le plus vite possible, il sent mauvais. En observant plus attentivement, je remarque deux prothèses d'avant-bras accrochés à son cou. Bingo!

    JOUR 3


    Ca doit être lundi...

    - Mais qu'est-ce que j'ai bien pu faire? Qui est-ce que je suis?

    Je regarde autour de moi et vois une rue déserte. Seul le cahot d'engins ferroviaires au loin perce le silence pesant de la ruelle. J'aurais voulu me lever mais une violente douleur au crâne me plaque immédiatement au sol.

    - Qu'est-ce que j'ai mal à la tête!

    Je fouille les poches de mon pantalon et mes doigts s'arrêtent sur ce qui semble être une carte de visite à moitié déchirée sur laquelle il ne reste que l'inscription: «...Gare». De vagues bribes de mémoire tournent dans ma tête sans que je réussisse à les fixer. Peut-être ce papier a-t-il quelque chose à voir avec mon passé, ma vie. Pendant que le tenancier détourne la tête, je m'introduis dans une chambre ouverte et me précipite sur la femme de ménage qui y travaille. Je mets une main sur sa bouche et lui fais signe de se taire.

    - Mmm, mmm, mm...

    - Qu'est-ce que vous voulez?

    - Mm, mmm, mm...

    - Vous me promettez de ne pas crier?

    Elle opina du chef.

    - Bon, alors qu'est-ce que vous voulez?

    - Je préférerais que vous me bouchiez le nez, plutôt...

    Elle eut soudain deux yeux ronds.

    - Monsieur, regardez votre bras.

    Sur le haut du coude, des chiffres romains étaient écrits à l'encre noire. Six et cent.


    Un belliqueux chinois lance un couteau et fait du karaté. Je réussis enfin à semer la voiture et m'engouffre dans un café.

    - Bonjour

    - Qu'est ce que vous voulez?

    - Mmm, mm, mmm

    - Quoi?!

    - Mmm, mm

    Je me souvins alors du bâillon qui m'obstruait la bouche.

    - Excusez-moi, je cherche la gare...

    - Ici c'est le café de la gare!

    - Le café de la gare?

    - Oui, qu'est ce que vous voulez?

    - La gare.

    - Vous voulez pas un café?

    - Un quoi?

    - Un café!

    - Ah! Bof...Je préférerais que vous dites où c'est qu'elle est la gare.

    Il y eut soudain un silence pesant que seul le cahot d'engins ferroviaires au loin semblait percer.

    - Vous sortez du café de la gare, vous prenez la rue de la gare et c'est au bout. Mais dites-moi, on ne s'est pas déjà vu? Votre tête me dit quelque chose!

    Il s'adressa à un homme louche qui épiait dans l'ombre depuis le début. Désinvolte, il soufflait la fumée d'une cigarette comme si cela avait une signification secrète.

    - Eh dis, y te rappelle pas quelqu'un ce type?

    - Si il était là hier soir.

    - Ah bon?! Peut-être est-ce que vous pouvez m'aider, je me suis réveillé ce matin, mon identité avait disparu. La seule piste que j'ai trouvée, c'est ce qui semblait être une carte de visite à moitié déchirée sur laquelle il ne restait que l'inscription: «...Gare» et sur le haut de mon coude, des chiffres romains écrits à l'encre noire.

    - Ca? C'est ton prénom ducon, et ton identité, c'est tes collègues qui l'ont gardée avec ta voiture.



    JOUR 4


    Mardi. Enfin sur pieds. En rédigeant le rapport, je sens comme une présence derrière moi et tout à coup, je manque d'air. Je sens sur mon cou son impression d'avoir des bras qui m'étranglent. Alors qu'il croit dominer la situation, je me retourne face à lui et le toise avec l'air supérieur du gars qui gère grave. Juste pour la blague, je lui lance un petit "au nom de la loi, je vous arrête" en lui montrant les menottes et tout le commissariat se bidonne sur sa poire.


    Pour purger sa peine, il a eu droit à des lentilles spéciales qui tiennent à la rétine avec une pointe de colle et qui représentent le visage d'Ellaide, pour qu'il n'oublie jamais son crime.

    La population peut dormir tranquille, l'Endive veille, Victor l'Endive.


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    Là, ça va peut-être un peu loin dans le conceptuel mais cette nouvelle s'appelle «Sommaire»

    et se compose de nouvelles-titres...


    Sommaire


    p.14 Les chaussures sans permis

    p.29 Mon ami le flan

    p.55 La sexualité troglodyte

    p.102 Le murmure du ru, poème

    p.104 Tintin et le cancer du Pharaon

    p.125 Une bien belle noix de coco!

    p.141 La poubelle est vide...

    p.154 La tontine des frères Kroutchorgski

    p.159 Gugu n'est plus, on l'appellera demain d'une cabine

    p.173 Hallo, ich heisse François Lebuzombier

    p.204 N'appuye surtout pas sur le AAAAAAAAAH...!

    p.209 Profession: fleuriste

    p.222 Monsieur Réussite et l'inconsistance qui en découle

    p.227 Pas d'enterrements pour les puddings

    p.230 Truc bizarre à St Lazare pour Groplan

    p.266 On achève bien les chameaux...

    p.277 On échauve bien les cheveux...

    p.288 On enlève bien les chapeaux...

    p.299 On élève bien les chapons...

    p.311 Une olive boit. Le chat pond...

    p.322 Olivier, roi des écharpes...


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  •  Et en avant première,

    LE BETISIER DU LIVRE

    Soulager Atlas, première


    Par une matinée de printemps

    Nous foulions innocents

    Les chemins de traverse,

    Jambes et pensées légères

    Sans rien à satisfaire

    Nous allions simplement.


    Mais après l'horizon

    Nous aperçumes unhomme, pffff

    Ah ah ah unhomme, ah, c'est trop drôle!


    Soulager Atlas, deuxième


    Par une matinée de printemps

    Nous foulions innocents

    Les chemins de traverse,

    Jambes et pensées légères

    Sans rien à satisfaire

    Nous allions simplement.


    Mais après l'horizon

    Nous aperçumes un home... mais qu'est-ce qui dit?

    Un home, ah, c'est pas vrai, on peut pas être sérieux deux minutes, ici!


    Soulager Atlas, troisième


    Par une matinée de printemps

    Nous AH AH AH

    Bon attend, je vais réesayer

    Par une matipfffff AH AH AH

    Non, j'y arriverais pas aujourd'hui, c'est trop drôle.

    Mon fiston chéri, première


    Si les trois premiers mots t'énervent, c'est que tu es prêt à grandir. Cherches où tu veut... Ah, flûte, j'ai pas conjugué, ah ah!


    Mon fiston chéri, deuxième


    Si les trois premiers mots t'énervent, c'est que tu es prêt à grandir. Cherches où tu vieux... Vends tes vieux voeux, la vieille vache velle un veau, v-e-u-x, veux, ce que tu V-E-U-X, veux! Je reprends... Cherches ce que tu velles, ah zut. Je prends cinq minutes. Ah ah. Mdr.


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